mardi 8 juin 2010

Candide by google

Rien n’était si beau, si leste, si brillant, si bien ordonné que les deux armées. Les trompettes, les fifres, les hautbois, les tambours, les canons, formaient une harmonie telle qu’il n’y en eut jamais en enfer. Les canons renversèrent d’abord à peu près six mille hommes de chaque côté ; ensuite la mousqueterie ôta du meilleur des mondes environ neuf à dix mille coquins qui en infectaient la surface. La baïonnette fut aussi la raison suffisante de la mort de quelques milliers d’hommes. Le tout pouvait bien se monter à une trentaine de mille âmes. Candide, qui tremblait comme un philosophe, se cacha du mieux qu’il put pendant cette boucherie héroïque.

Candide. Chap 3. Voltaire.

Les pensées de Pascal by Google

L'homme n'est qu'un roseau le plus faible de la nature ; mais c'est un roseau pensant. Il ne faut pas que l'univers entier s'arme pour l'écraser. Une vapeur, une goutte d'eau suffit pour le tuer...

Il est dangereux de trop faire voir à l'homme combien il est égal aux bêtes, sans lui montrer sa grandeur... L'homme n'est ni ange ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l'ange fait la bête

Pensées. Blaise Pascal.

L'iliade et l'odyssée by google

Chant I. Chante, déesse, la colère désastreuse d'Achille, fils de Pélée, qui de maux infinis accabla les Achéens et précipita chez Hadès tant de fortes âmes de héros, livrés eux-mêmes en pâture aux chiens et à tous les oiseaux carnassiers. Et le dessein de Zeus s'accomplissait ainsi, depuis qu'une querelle avait divisé le fils d'Atrée, roi des hommes, et le divin Achille.

L'iliade. Chant 1. Homère.

Phèdre by google

Hyppolite :

Cher Théramène, arrête, et respecte Thésée.

De ses jeunes erreurs désormais revenu,

Par un indigne obstacle il n'est point retenu ;

Et fixant de ses voeux l'inconstance fatale,

Phèdre depuis longtemps ne craint plus de rivale.

Enfin en le cherchant je suivrai mon devoir,

Et je fuirai ces lieux que je n'ose plus voir.

Phèdre. Acte I, Sc 1. Racine.

La Princesse de Clèves by google

La magnificence et la galanterie n'ont jamais paru en France avec tant d'éclat que dans les dernières années du règne de Henri second. Ce prince était galant, bien fait et amoureux ; quoique sa passion pour Diane de Poitiers, duchesse de Valentinois, eût commencé il y avait plus de vingt ans, elle n'en était pas moins violente, et il n'en donnait pas des témoignages moins éclatants.

La Princesse de Clèves. Mme de Lafayette.

L'enfer by google

AVANT MOI IL NE FUT RIEN CRÉÉ.

SINON D'ÉTERNEL

ET MOI JE DURE ÉTERNELLEMENT.

VOUS QUI ENTREZ,

LAISSEZ TOUTE ESPÉRANCE

Je lis ces mots aux couleurs sombres,

écrits en haut du portail

et dont le sens m'est cruel à saisir :

Ici, tu ne dois plus craindre,

et il te faut tuer toute lâcheté en toi.

L'enfer. Chant 3. La Divine Comédie. Dante.

Eugénie Grandet by google

Il se trouve dans certaines villes de province des maisons dont la vue inspire une mélancolie égale à celle que provoquent les cloîtres les plus sombres, les landes les plus ternes ou les ruines les plus tristes. Peut-être y a-t-il à la fois dans ces maisons et le silence du cloître et l'aridité des landes et les ossements des ruines. La vie et le mouvement y sont si tranquilles qu'un étranger les croirait inhabitées, s'il ne rencontrait tout à coup le regard pâle et froid d'une personne immobile dont la figure à demi monastique dépasse l'appui de la croisée, au bruit d'un pas inconnu.

Eugénie Grandet. Balzac.


vendredi 4 juin 2010

A La Recherche du Temps Perdu by Google



Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n’avais pas le temps de me dire: «Je m’endors.» Et, une demi-heure après, la pensée qu’il était temps de chercher le sommeil m’éveillait; je voulais poser le volume que je croyais avoir encore dans les mains et souffler ma lumière; je n’avais pas cessé en dormant de faire des réflexions sur ce que je venais de lire, mais ces réflexions avaient pris un tour un peu particulier; il me semblait que j’étais moi-même ce dont parlait l’ouvrage: une église, un quatuor, la rivalité de François Ier et de Charles Quint.
A La Recherche du Temps Perdu. Marcel Proust.

mardi 1 juin 2010

Bakou, derniers jours by google

A Gonur Depe, l’ancienne Margouch, on marche sur des tessons vieux de quatre mille ans. Beaucoup d’oiseaux agités et jacasseurs, de tourterelles aussi, et de temps en temps un coucou dont le cri, le nombre de fois où il est répété, indique (selon Maya) les années qui vous restent à vivre : or cela m’intéresse beaucoup, pas par anxiété particulière mais parce que c’est ce genre de jeu qui m’a mené ici, dans les steppes de l’Asie centrale. Seulement, chaque fois que j’entends chanter le coucou, j’ai raté le début, et ainsi son oracle reste obscur. Peut-être, après tout, est-ce son silence qui importe, signifiant que mon temps est complètement échu ?

Bakou, derniers jours. Olivier Rolin. Grasset.

lundi 31 mai 2010

Le crépuscule d'une idole by google

Travaillé par des pulsions incestueuses, Freud voit de l'inceste partout. De sorte qu'il élabore une théorie de l'origine traumatique des psychopathologies à partir d'une source unique : l'abus de leur progéniture par leur géniteur : l'abus d'une petite fille par son père. Cette ardeur à transformer le père en monstre et à vouloir vérifier cette hypothèse personnelle dans tous les cas qui lui sont donnés à examiner le conduit sur la voie dangereuse d'une universalisation de sa maxime obsessionnelle. Cette théorie dite de la séduction fut également un nouvel échec sur le terrain de la psychothérapie - un de plus. Freud affirme donc qu'à l'origine de toute pathologie se trouve toujours un abus sexuel du père sur son enfant dans ses plus jeunes années. Des preuves ? Aucune.

Le crépuscule d'une idole, l'affabulation freudienne. Michel Onfray. Grasset.

jeudi 27 mai 2010

Les Misérables by Google


Le spectacle était épouvantable et charmant. Gavroche fusillé, taquinait la fusillade. Il avait l'air de s'amuser beaucoup. C'était le moineau becquetant les chasseurs. Il répondait à chaque décharge par un couplet. On le visait sans cesse, on le manquait toujours. Les gardes nationaux et les soldats riaient en l'ajustant. Il se couchait, puis se redressait, s'effaçait dans un coin de porte, puis bondissait, disparaissait, reparaissait, se sauvait, revenait, ripostait à la mitraille par des pieds de nez, et cependant pillait les cartouches, vidait les gibernes et remplissait son panier. Les insurgés, haletants d'anxiété, le suivaient des yeux. La barricade tremblait ; lui, il chantait. Ce n'était pas un enfant, ce n'était pas un homme ; c'était un étrange gamin fée. On eût dit le nain invulnérable de la mêlée...

Les Misérables. Victor Hugo.

mardi 11 mai 2010

L'invitation au voyage by Google



L'invitation au voyage

Mon enfant, ma soeur,
Songe à la douceur
D'aller là-bas vivre ensemble!
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble!
Les soleils mouillés
De ces ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traîtres yeux,
Brillant à travers leurs larmes.

Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.

Charles Baudelaire. Les fleurs du mal

lundi 3 mai 2010

Hamlet by Google


To be, or not to be: that is the question:

Whether 'tis nobler in the mind to suffer
The slings and arrows of outrageous fortune,
Or to take arms against a sea of troubles,
And by opposing end them? To die: to sleep;
No more; and by a sleep to say we end
The heart-ache and the thousand natural shocks
That flesh is heir to, 'tis a consummation
Devoutly to be wish'd. To die, to sleep; to sleep

Hamlet. Shakespeare.

dimanche 18 avril 2010

La Chartreuse de Parme by Google

Le 11 mai 1796, le général Bonaparte fit son entrée dans Milan à la tête de cette jeune armée qui venait de passer le pont de Lodi, et d'apprendre au monde qu'après tant de siècles César et Alexandre avaient un successeur. Les miracles de bravoure et de génie dont l'Italie fut témoin en quelques mois réveillèrent un peuple endormi ; huit jours encore avant l'arrivée des Français, les Milanais ne voyaient en eux qu'un ramassis de brigands, habitués à fuir toujours devant les troupes de Sa Majesté Impériale et Royale : c'était du moins ce que leur répétait trois fois la semaine un petit journal grand comme la main, imprimé sur du papier sale...
La Chartreuse de Parme. Henri Beyle Stendhal.